Page:De Merejkowsky - Le Roman de Léonard de Vinci, 1907.djvu/215

Cette page n’a pas encore été corrigée

peinture imaginée par le duc de Milan – un tétragone de nœuds de corde, sans commencement et sans fin, entourant l’inscription latine : LEONARDI • VINCI • ACADEMIA. Il est absorbé par ce travail au point que rien au monde n’existe plus pour lui en dehors de ce jeu compliqué, difficile et inutile. Il semble que rien ne pourrait l’en détacher. Je ne pus me contenir et me décidai à lui rappeler la tête inachevée de l’apôtre Jean. Il hausse les épaules sans lever les yeux de dessus ses nœuds de ficelle et grince entre les dents :

— Nous avons le temps. Il ne s’en ira pas.

Je comprends parfois la méchanceté de Cesare.

Ludovic le More lui a confié l’installation dans son palais de tuyaux acoustiques cachés dans l’épaisseur des murs, l’oreille de Denys, permettant au seigneur d’entendre dans un appartement ce qui se dit dans l’autre. Tout d’abord, Léonard s’en occupa avec passion. Mais bientôt, selon son habitude, son enthousiasme refroidi, il commença à remettre ces travaux sous différents prétextes. Le duc le presse et se fâche. Aujourd’hui on est venu plusieurs fois du palais le chercher. Mais le maître est pris par un autre travail nouveau qui lui semble non moins important que l’installation de l’oreille de Denys – des expériences sur les plantes : ayant coupé les racines d’une citrouille