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traduit pour lui du latin en français, un opuscule assez ignare, Les Merveilles de RomeMirabilia urbis Romæ.

Rendu craintif par son père, Charles, enfant maladif, pendant sa triste jeunesse passée dans le solitaire château d’Amboise, avait été élevé à la lecture des romans de chevalerie qui avaient quelque peu brouillé son cerveau déjà faible. Roi de France et s’imaginant revivre un héros dans la légende de Lancelot, d’Arthur et de Tristan, ce jeune homme de vingt ans, inexpérimenté et timide, bon et fou, avait résolu de mettre en action ce qu’il avait lu dans ses livres. Selon l’expression des historiens de la cour : « Fils du dieu Mars, descendant de Jules César, il était venu en Lombardie à la tête d’une formidable armée à telle fin de conquérir Naples, les deux Siciles, Constantinople, Jérusalem, détrôner le Grand Turc, déraciner l’hérésie mahométane et délivrer le tombeau du Christ du joug des infidèles. »

À l’audition des Merveilles de Rome, le roi goûtait à l’avance la gloire qu’il acquerrait en soumettant une ville aussi célèbre.

Ses idées s’embrouillaient. Une douleur à l’épigastre et une lourdeur de tête lui rappelaient le trop gai souper de la veille en compagnie de dames milanaises. Le souvenir de l’une d’entre elles, Lucrezia Crivelli, l’avait hanté toute la nuit.

Charles VIII était petit de taille et laid de figure. Ses jambes étaient maigres et torses ; ses épaules étroites, l’une plus haute que l’autre ; la poitrine