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— À la tombée de la nuit veuillez de nouveau pratiquer la saignée, ordonna-t-il, lorsque le bras fut bandé et qu’on étendit le duc sur les coussins.

Domine magister, murmura le barbier respectueusement, ne vaudrait-il pas mieux attendre ? Le malade est faible. Une trop grande prise de sang…

Il s’intimida. Le docteur eut pour lui un sourire de mépris.

— Vous n’avez pas honte, mon ami ! Vous devriez pourtant savoir que sur les vingt-quatre livres de sang que contient le corps humain, on peut en supprimer vingt, sans crainte aucune ni pour la vie, ni pour la santé. Plus vous prenez d’eau contaminée dans un puits, plus il vous en reste de pure. J’ai pratiqué la saignée sans merci sur des enfants nouveau-nés, toujours avec réussite.

Léonard, qui écoutait attentivement, voulut répliquer, mais songea que discuter avec des docteurs était aussi inutile que discuter avec des alchimistes.

Le docteur et le barbier sortirent. Le nain arrangea les coussins, enveloppa les pieds du malade.

Léonard jeta un coup d’œil sur la chambre. Au-dessus du lit pendait une cage avec un petit perroquet vert. Sur une table ronde, près d’une cuve de cristal, contenant des poissons dorés, traînaient des cartes et des osselets. Aux pieds du duc, un chien blanc roulé en boule dormait.

— Tu as envoyé la lettre ? demanda le duc sans ouvrir les yeux.

— Ah ! Altesse ! balbutia le bouffon, nous attendions,