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Gros Guilloche l’accompagnait de sa voix éraillée.

Lorsque Lotta repassa devant eux, les yeux modestement baissés, le sergent la prit par la taille et essaya de l’attirer sur ses genoux.

Elle le repoussa, se défit de son étreinte et s’enfuit. Il se leva, la rattrapa et l’embrassa sur la joue, les lèvres tout humides encore de vin.

La jeune fille cria, laissa choir le broc de glaise qui se brisa en morceaux, et, se retournant, appliqua de tout son élan une gifle telle au soldat qu’il en resta un moment hébété.

Tout le monde s’esclaffa.

— Bravo, la fille ! cria le brodeur Mascarello. Par San Gervasio, de ma vie je n’ai vu plamussade aussi solide ! Ah ! tu l’as consolé !

— Laisse-la, laisse-la ! disait Gros Guilloche retenant Bonnivar.

Mais le Gascon ne l’écoutait pas. L’ivresse lui montait au cerveau. Il eut un rire forcé et cria :

— Ah ! ventrebleu ! C’est ainsi ! Attends, ma belle, maintenant ce n’est pas ta joue mais tes lèvres que je baiserai !

Il se jeta à la poursuite de Lotta, renversa une table, la rattrapa et voulut mettre sa menace à exécution. Mais la puissante main de l’étameur Scarabullo le saisit au collet.

— Fils de chien ! gueule d’impie ! criait Scarabullo en secouant Bonnivar et lui serrant la gorge. Attends, je te caresserai les côtes de façon à ce que tu n’offenses plus les pucelles milanaises !