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savants grecs réfugiés en Italie qui avaient à leur tête le cardinal Bessarion, un partisan du dernier maître de la sagesse antique, le néo-platonicien Pleuton, mort une quarantaine d’années auparavant, dans cette même petite ville de Mistra, près des ruines de Lacédémone, où était née la mère de Cassandra. Ses disciples croyaient que l’âme du grand Platon, pour prêcher la sagesse, était revenue de l’Olympe et s’était incarnée en Pleuton. Les maîtres chrétiens assuraient que ce philosophe voulait renouveler l’hérésie de l’Antéchrist pratiquée par l’empereur Julien l’Apostat, l’adoration des dieux olympiens, et que, pour lutter contre lui, il ne fallait ni les savantes déductions ni les controverses, mais les armes de la très sainte Inquisition et le feu du bûcher. Et l’on citait les paroles de Pleuton, disant à ses disciples : « Peu d’années après ma mort, au-dessus de toutes les nations et de toutes les tribus, resplendira une religion unique et tous les hommes s’uniront en une même foi (unam eamdemque religionem universum orbem esse suscepturam) ». Quand on lui demandait : « Laquelle – celle du Christ ou de Mahomet ? » il répondait : « Ni l’une ni l’autre, mais une autre ; la foi de l’antique paganisme (neutram, inquit, sed a gentilitate non differentem). »

Demetrius élevait la jeune Cassandra dans une sévère piété chrétienne. Mais en écoutant les conversations, l’enfant, qui ne comprenait pas les finesses de la philosophie platonicienne, se forgeait une fable merveilleuse de la résurrection des dieux olympiens.