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— Luigi Marliani m’a affirmé qu’il n’en avait plus pour longtemps, dit le duc : ce mieux ne durera pas, il mourra sûrement.

— Qui sait ? répliqua Béatrice. On le soigne si bien. Écoute, je m’étonne de ton insouciance. Tu supportes les offenses comme un mouton. Tu dis : « Le pouvoir est en nos mains », mais ne vaut-il pas mieux renoncer au pouvoir que de trembler à cause de lui, jour et nuit, comme un voleur, que de s’abaisser devant cet hybride Charles VIII, de dépendre de la magnanimité de l’insolent Alphonse, de chercher des compromissions avec cette méchante sorcière d’Aragon ! On dit qu’elle est de nouveau enceinte, un nouveau serpenteau dans le nid maudit. Et il en sera ainsi toute la vie, Ludovic ; songe un peu, toute la vie ! Et tu appelles cela « le pouvoir en nos mains » !

— Mais les médecins sont d’accord pour déclarer la maladie incurable. Tôt ou tard…

Ils se turent.

Soudain elle l’enserra dans ses bras, se frôla à lui de tout son corps et lui murmura quelques mots à l’oreille. Il frissonna.

— Bice !… Que le Christ et la Sainte-Vierge te protègent ! Jamais, entends-tu ? jamais ne me parle de cela…

— Si tu as peur, veux-tu que je le fasse moi-même ?

Il ne répondit pas, puis au bout d’un instant demanda :

— À quoi penses-tu ?