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Le maître, accompagné du principal officier de bouche, fit le tour de la table, en examina l’ordonnance. La duchesse entra dans la salle, suivie de ses invités, au nombre desquels Léonard, resté à la villa.

On récita la prière et tout le monde s’assit.

Le menu se composait d’artichauts frais expédiés par exprès de Gênes, de carpes et d’anguilles pêchées dans les viviers de Mantoue, cadeau d’Isabelle d’Este, et de poitrines de chapons en gelée.

On mangeait en se servant de trois doigts et d’un couteau, sans fourchettes, considérées comme un luxe superflu. On n’en servait qu’aux dames pour les fruits et les confitures, et elles étaient en or avec le manche en cristal de roche.

Le seigneur soignait ses hôtes. On mangea et on but beaucoup, presque à satiété, et les plus belles dames n’eurent point honte de leur appétit.

Béatrice était assise auprès de Lucrezia. Le duc de nouveau les admira toutes deux : il lui était particulièrement agréable de les voir ensemble et sa femme s’occuper de sa bien-aimée, lui donnant les meilleurs morceaux, lui chuchotant à l’oreille, lui serrant la main en un élan de gamine tendresse, presque amoureuse, comme cela arrive souvent entre jeunes femmes. On parla de la chasse. Béatrice raconta comment un cerf avait failli la renverser lorsque, sortant du bois, il avait attaqué son cheval. On rit du bouffon Diodio, vantard agressif qui venait de tuer en guise de sanglier un cochon domestique emmené exprès par