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Ce sera demain » ; et chaque jour on remet le départ. Le roi est préoccupé par des divertissements moins que guerriers.

— Comment se nomme la favorite ?

— Il en a beaucoup. Les goûts de Sa Majesté sont changeants et fantasques.

— Écrivez au comte Belgiojoso, dit le duc, que j’envoie trente… non, c’est peu… quarante… cinquante mille ducats pour de nouveaux présents. Qu’il n’épargne rien. Nous sortirons le roi de Lyon avec des chaînes d’or. Et sais-tu, Bartolomeo – ceci, tout à fait entre nous – il ne serait pas mauvais d’envoyer à Sa Majesté les portraits de quelques-unes de nos beautés. À propos, la lettre est-elle prête ?

— Oui, Seigneur.

— Montre.

Le More frottait avec satisfaction ses mains blanches. Chaque fois qu’il considérait l’énorme toile d’araignée de sa politique, il éprouvait une douce émotion à ce jeu dangereux et compliqué. Dans sa conscience, il ne s’estimait pas coupable d’appeler des étrangers les barbares du Nord, en Italie, puisqu’il y était contraint par ses ennemis, parmi lesquels le plus farouche était Isabelle d’Aragon, l’épouse de Jean Galéas, qui accusait universellement Ludovic le More d’avoir volé le trône à son neveu. Ce ne fut que sur la menace du père d’Isabelle, Alphonso, roi de Naples, qui voulait venger sa fille et son gendre en déclarant la guerre au More, que celui-ci, abandonné de tous, sollicita l’aide du roi français Charles VIII.