Page:De Merejkowsky - Le Roman de Léonard de Vinci, 1907.djvu/108

Cette page n’a pas encore été corrigée

II

Elle avait pris l’habitude de s’habiller si lentement que, selon l’expression du duc, on pouvait, pendant ce temps, effectuer tout le chargement d’un navire marchand à destination des Indes.

Enfin, entendant dans le lointain le son du cor et les aboiements des chiens, elle se souvint d’avoir commandé une chasse et se hâta. Puis, lorsqu’elle fut prête, elle entra dans les logements des nains, surnommés par dérision le logis des géants et installés à l’instar des chambres en miniature du palais d’Isabelle d’Este.

Les chaises, les lits, les escaliers à larges marches, une chapelle même, avec un autel microscopique – où la messe était dite par le savant nain Janakki, vêtu d’habits archiépiscopaux exécutés exprès pour lui, et coiffé de la mitre : tout était calculé pour la taille de ces pygmées.

Dans ce logis des géants régnaient toujours le bruit, les rires, les pleurs, des cris divers proférés par des voix terribles, telles qu’on en entend dans une ménagerie ou une maison d’aliénés. Car ici grouillaient, naissaient, vivaient et mouraient, dans une étouffante promiscuité, des singes, des perroquets, des bossus, des négrillons, des idiots, des bouffons et autres êtres