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— Oh ! oh ! oh ! la vieillesse n’est pas un bonheur ! Que de peine j’ai eue pour monter !… Que le Seigneur donne la santé à Votre Seigneurie ! dit la vieille, en baisant servilement le bas du sciavonetto.

— Ah ! monna Sidonia ! Eh bien !… Est-ce prêt ?

La vieille retira de sa poche un flacon soigneusement enveloppé et cacheté, contenant un liquide trouble fait de lait d’ânesse et de chèvre rousse, dans lequel infusaient de la badiane sauvage, des griffes d’asperge et des oignons de lys blanc.

— Il aurait fallu le garder encore deux jours dans du fumier chaud. Mais je crois tout de même que la liqueur est à point. Seulement, avant de vous en servir, ordonnez qu’on le passe dans un filtre en feutre. Trempez un morceau de mie de pain et frottez votre figure, le temps de réciter trois fois le Symbole de la Foi. Au bout de cinq semaines, vous n’aurez plus le teint basané, plus le moindre bouton.

— Écoute, vieille, dit Béatrice, s’il y a encore dans cette mixture une de ces saletés qu’emploient les sorcières dans la magie noire, soit de la graisse de serpent, soit du sang de huppe ou de la poudre de grenouilles séchées dans une poêle, comme dans la pommade que tu m’as donnée contre les verrues, dis-le-moi de suite.

— Non, non, Votre Seigneurie ! Ne croyez pas ce que vous racontent les méchantes gens. Parfois on ne peut éviter certaines saletés : tenez, par exemple, la très respectable madonna Angelica, tout l’été dernier, s’est lavé la tête avec de l’urine de porc pour arrêter la