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Le matelot traverse les mers, se livre aux flots et aux tempêtes, se hasarde entre les écueils, souffre le froid et le chaud, afin de s’assurer quelque repos dans ses vieux ans.

La liberté est le repos des peuples.

Le soldat se soumet aux plus dures privations, il veille et combat, et donne son sang pour ce qu’il appelle la gloire.

La liberté est la gloire des peuples.

S’il est un peuple qui estime moins la justice et la liberté que le laboureur sa moisson, l’artisan un peu de pain, le marchand les richesses, le matelot le repos, et le soldat la gloire ; élevez autour de ce peuple une haute muraille, afin que son haleine n’infecte pas le reste de la terre.

Quand viendra le grand jour du jugement des peuples, il lui sera dit : Qu’as-tu fait de ton âme ? on n’en a vu ni signe ni trace. Les jouissances de la brute ont été pour toi. Tu as aimé la boue, va pourrir dans la boue.

Et le peuple, au contraire, qui, au-dessus des biens matériels, aura placé dans son cœur les vrais biens ; qui pour les conquérir n’aura épargné aucun travail, aucune fatigue, aucun sacrifice, entendra cette parole :

À ceux qui ont une âme la récompense des âmes. Parce que tu as aimé plus que toutes choses la liberté et la justice, viens, et possède à jamais la justice et la liberté.