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têtes coupées ; et, ouvrant la bouche, ces têtes disaient :

Nous nous étions dévouées pour toi, et voilà le prix que nous avons reçu. Dors, dors, nous ne dormons pas, nous. Nous veillons l’heure de la vengeance : elle est proche.

Et le sang se figeait dans les veines de l’homme endormi. Et il se disait : Si au moins je pouvais laisser ma couronne à cet enfant : et ses yeux hagards se tournaient vers un berceau sur lequel on avait posé un bandeau de reine.

Mais, lorsqu’il commençait à se calmer et à se consoler un peu de cette pensée, un autre homme, semblable à lui par les traits, saisit l’enfant et l’écrasa contre la muraille.

Et le vieillard se sentit défaillir d’horreur.

Et il fut transporté au même instant en deux lieux divers ; et, quoique séparés, ces lieux, pour lui, ne formaient qu’un lieu.

Et il vit deux hommes, qu’à l’âge près on aurait pu prendre pour le même homme : et il comprit qu’ils avaient été nourris dans le même sein.

Et leur sommeil était celui du condamné qui attend le supplice à son réveil. Des ombres enveloppées d’un linceul sanglant passaient devant eux, et chacune d’elles, en passant, les touchait, et leurs membres se retiraient et se contractaient comme pour se dérober à cet attouchement de la mort.

Puis ils se regardaient l’un l’autre avec une espèce