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cette loi fatale que M. André Siegfried a voulu mettre en évi- dence lorsqu'il a déclaré dans son dernier ouvrage que l’ave- nir du Canada était, selon lui, tourné non vers l’Europe, mais vers le continent américain.

Quant au point de vue du Canadien français, qui pourra sur- prendre chez nous, il est encore plus net.

Rien de plus émouvant, je crois l’avoir montré dans les pages qui précèdent, que cet attachement, vieux de trois siècles, a l’image de la France. Les habitants de la province de Québec, qui sont près de trois millions, n’ont cessé de livrer bataille pour préserver leur religion, leur langue, leurs cou- tumes. Et si la bataille s’est éteinte, c’est que le gouvernement britannique n’use plus de contrainte aujourd’hui et souscrit avec la meilleure foi et la plus grande intelligence au maintien de la tradition française.

Malgré tout, ce sont eux qui se jugent le plus éloignés de la politique anglaise et des devoirs qu’elle leur impose.

Je sais bien qu'on pourrait citer des exceptions; néan- moins la position générale est bien établie. Ce fut même, au moment de la déclaration de guerre, un point assez délicat pour nous autres voyageurs français. Nous étions fêtés partout avec chaleur, adoptés comme on le serait par des parents retrouvés.

A cet égard, notre mission, qui apportait aux universités de Québec et de Montréal deux bourses pour les étudiants cana- diens, garde un souvenir ému de l'accueil qui lui a été fait. Mais, sur le chapitre de la guerre, c'était dans la presse et dans les milieux canadiens anglais, beaucoup plus que parmi nos cousins de France, que l’obéissance et l'adhésion étaient entières.

A cela on m'objectera que les Anglais ont longtemps traité en inférieurs les Canadiens d’origine française, que, pendant la dernière guerre, ils leur ont généralement assigné des places