dance. Et voilà comment un pèlerinage littéraire, très éloigné de l’Europe, peut, hélas ! se rattacher à l’actualité.
Je ne sais quels étaient à l’époque, les événements auxquels Hémon fait allusion de la forêt canadienne. Mais je n’oublie- rai pas comment, le 22 août dernier, j'ai appris les menaces nouvelles. Pas davantage les figures qui m’entouraient.
Deux jours plus tôt, nous avions quitté Québec par la route, après un dernier tour sur la belle esplanade qui domine le Saint-Laurent et une dernière promenade dans le grand parc consacré à la mémoire des deux adversaires, Wolfe et Mont- calm. Hors de la ville, les scènes avaient vite changé. Québec, qui reçoit beaucoup de touristes américains, doit se préoceu- per de leur goût et de leurs curiosités. C’est pour eux sans doute que l’on a construit ce vaste hôtel en forme de château fort. Pour eux aussi que l’on conserve ces tilburys d’opérettes. à grandes roues blanches et à capotes doublées de couleurs vives. Pour eux enfin que les gamins des rues offrent en nasil- lant le dernier journal de New-York. Mais si on leur en demande le prix, c’est un accent de petit gars normand qui vous répond : « Trois sous. »
Dans les campagnes, surtout lorsqu'on va vers le Nord, la vieille tradition n’a cure de ces déguisements. Toutes les enseignes ou presque sont françaises et plus d’une maison arbore même notre drapeau. De chaque côté de la route, des fermes basses, passées à la chaux et couvertes de toits de bois qui imitent les tuiles, font penser à certaines métairies modèles de l'Ile-de-France. Les églises des villages, assurément moins émouvantes que les nôtres — surtout à l’intérieur, où l’art de Saint-Sulpice n’embellit guère le fond puritain, — ont pour- tant des clochers effilés qui attirent de loin le regard, et évo- quent la mode de Saintonge ou de l’île de Ré.
Lorsque notre petite caravane s’arrêtait devant une de ces églises, après de rapides saluts aux notables, rassemblés autour
2
