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Tout ce paysage donne l'impression d’un autre âge et d’un autre rythme de vie. Ce n’est pas une ville morte, mais une ville qui a résisté, et l’on se sent invinciblement attiré vers cette architecture où les lois de l'urbanisme n’ont pas entamé les raisons du cœur.

Mais, autant que les pierres, je regarde le visage des Qué- becois qui sont montés à bord, et j'écoute leur parler. D’où viennent ces mots et ces intonations ? De Normandie, d’An- jou, de Saintonge ?

C’est assez difficile à dire. On pense moins à telle ou telle de nos provinces qu'à une manière particulière de vivre et de penser, de goûter respectueusement les choses. Je me rappelle une petite terre où j'ai entendu déjà ce langage placide et volontaire, ces tournures gauches et savoureuses. Ce sont les îles anglo-normandes. Il y a quarante ans, à Guernesey, on rencontrait de vieilles gens qui, vous montrant Hauteville House, disaient aux Français : « Icitte habitait M. Victor Hugo, le grand poite. » Et ils avaient l'air de parler d’un de leurs compatriotes à des étrangers.


Il

« … Je suis également les nouvelles de la guerre ; mais les plus grands eflorts d'imagination n'arrivent pas à me faire prévoir une guerre prochaine. Si l’inattendu se produisait pourtant — ce qui arrive — je suis en bien belle condition pour faire campagne, après mon séjour dans les bois. »

Ces lignes, datées de 1913, je les trouve dans un ouvrage consacré à Louis Hémon. Elles sont extraites de sa correspon-