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qui se nourrissent de chair, sont indomptables. Ils respirent le sang. Ils ont un air terrible, une férocité naturelle qui répond à leur force, du courage & de l’industrie. L’homme lui-même, qu’un sentiment de pitié innée intéresse pour tous les êtres animés, ne sent point cette commisération pour les victimes innocentes de sa voracité. Je ne répéterai donc pas qu’il est aussi conforme à l’ordre qu’un loup affamé dévore un homme, qu’il est ordinaire à l’homme de se repaître de la chair d’un chevreuil ou d’un poulet. L’un a dans la supériorité de sa force & l’impulsion de la nature, toute la raison que l’autre trouve si bien fondée sur son industrie & l’excellence de son être. S’il pouvoit y avoir de l’injustice d’une part, ce ne seroit certainement pas du côté du loup qui a un droit aussi égal à tout ce qui peut satisfaire ses besoins naturels, qu’aucun animal raisonnable, & qui pourroit de plus risquer de mourir de faim, s’il ne profitoit de l’occasion.

« Si nous considérons la solidité, la grosseur & la longueur des griffes du Lion ; si nous examinons la manière ferme & exacte, avec laquelle elles sont liées & jointes à son énorme patte ; si nous envisageons ses dents terribles, la force de ses machoires, & la largeur de sa gueule épouvantable, on découvrira d’abord