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plus heureux pour nous de n’en être jamais sortis ?

Qu’on exagere tant qu’on voudra la structure merveilleuse de la terre, qui la rend si propre à porter toutes sortes de fruits ; ces montagnes d’où découlent les fleuves ; ces vastes campagnes, couvertes de moissons dorées ; ces côteaux couronnés de vignobles ; ces vergers plantés de fruits ; ces vallées où les troupeaux trouvent une herbe tendre & fraîche ; ces bassins d’eaux minérales, préparés par une main invisible ; les vertus innombrables des végétaux ; l’utilité universelle des sels ; tant de métaux, le mercure surtout d’un usage si étendu dans la médécine, remede infaillible contre le venin mortel qui attaque le genre humain jusques dans la source de la vie. Tout cela n’est que le contrepoids de notre misere. Cette affluence de biens me rappelle les peines qu’ils coûtent, les maux qu’ils doivent adoucir, & ceux encore qu’ils aigrissent. En garde ici contre les accès d’une philosophie sombre qui empoisonne tout, je dis avec candeur que le grand nombre de ces dons vantés, sont des présens dangereux, que les plus utiles nous étoient dus à double titre, comme nécessaires à nos besoins naturels, & comme le produit légitime de nos travaux. Il faut remuer la terre & l’ensemencer.