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la rotation du globe, la succession du jour & de la nuit : jour qui prête sa clarté aux scenes sanglantes que nous abhorrons, & aux actions généreuses que l’on n’admirera jamais assez : nuit qui répand à propos ses pavots bienfaisans sur le manœuvre fatigué, pour réparer ses forces, & qui couvre de ses ombres criminelles l’inceste & l’adultere.

On diroit que la Nature se combat sans cesse avec une constance cruelle. Le tems produit par lui-même est par lui-même détruit. Il engendre tout, puis il dévore ses enfans. Les élémens servent en esclaves ses volontés contraires. L’air, le principe de la vie, se charge d’exhalaisons infectes, & va porter des semences de mort au sein de ceux qui le respirent. La bise succede au doux zéphyr. Les vents réguliers assurent la navigation : les aquilons furieux troublent la plaine liquide.

Le feu échappé des veines des cailloux, s’attache aux matieres combustibles pour réchauffer nos membres engourdis, pour préparer à nos estomacs débiles une nourriture facile à digérer, pour fondre & façonner les métaux. Ce même feu ébranle la terre jusques dans ses fondemens, détruit des villes entieres & consume leurs habitans. Sous la forme d’une flamme subtile, il nous dédommage de l’absence du soleil. Le méchaniste adroit le substitue comme force mouvante à