ce qu’il est, avant de raisonner sur ce qu’il peut être. La Nature est aussi parfaite qu’il se peut dans le systême actuel. Lorsque Moyse représente Dieu parlant & créant, il lui fait approuver tous ses ouvrages, & en exalter également la bonté, à mesure qu’ils sortent de ses mains tout-puissantes. Il crée les feux souterrains qui embraseront des villes entieres, les eaux qui submergeront le Globe terrestre, l’homme qui tuera son frere & blasphémera son Auteur ; néanmoins il dit que tout est bon. C’est que l’embrasement de Sodome, le Déluge Universel & l’impiété des hommes sont réellement des ingrédiens nécessaires du plan qu’il projetta, avant la naissance des tems.
On admet communément une troisieme espece de perfection, une perfection de préjugé : celle qui résulte d’une idée arbitraire du beau, d’une convention gratuite, souvent démentie par le bon-sens. Celle-ci fait regarder certaines parties comme plus nobles que d’autres, & certaine texture comme plus délicate qu’un tissu different. Mais elle varie avec les mœurs, le climat, les intérêts, & ressemble à un pur caprice.
L’Essence absolument parfaite n’a pas plus la liberté de se dépouiller de ses perfections propres pour les donner à une autre,