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nouer quelques boutons. C’est plutôt lorsqu’au printemps il se couronne de fleurs brillantes dont les couleurs vives & le doux parfum qu’elles exhalent, charment la vue & l’odorat.

Tout Etre chérit son existence & cherche à l’aggrandir autant qu’il en est capable. Le moindre bluet suce la terre ; par une force aspirante il pompe ce suc & le filtre jusqu’à l’extrêmité de ses feuilles. Il se nourrit encore des pluies qui l’arrosent. Il s’étend, il croît, il atteint peu à peu la perfection de son espece. L’esprit humain doit suivre la loi commune. L’on ne voit pas ce qui pourroit troubler ou arrêter la progression de ses connoissances ; ce qui s’opposeroit à son développement ; ce qui étoufferoit l’activité de cet esprit tout de feu qui a certainement sa destination, puisque Rien n’est fait en vain[1] ; & dont la destination ne sauroit être que d’imaginer, inventer & perfectionner.

Non : les hommes n’étoient pas faits pour

  1. Je ne crains point d’avancer ici que, s’il y avoit une seule inutilité réelle dans la Nature, il seroit plus probable que le hasard eut présidé à sa formation, qu’il ne le seroit qu’elle eût pour auteur une Intelligence parfaite. Car il est plus singulier qu’une Intelligence infinie agisse sans dessein, qu’il ne seroit étonnant qu’un principe aveugle se conformât à l’ordre par pur accident.