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à la rigueur l’interdit porté contre les hamalécites, plus de quatre cens ans après leur crime, c’est-à-dire, sur des hommes qui ne pouvoient pas avoir participé à l’impiété de leurs ancêtres, sur des enfans à la mamelle, dont l’innocence les en rendoit encore moins responsables [1]! Quelle étrange bonté dans le créateur, de faire à l’homme des dons empoisonnés dont il prévit l’abus, de vouloir qu’il soit sollicité sans cesse au mal par un penchant fatal qu’il lui donna, résolu de le châtier avec la plus terrible sévérité, s’il a le malheur d’y succomber ! Qu’elle confine de près à la malice ! Et cependant qu’elle est supérieure à ce tendre sentiment qui nous porte à procurer aux autres tout le bien qui est en notre pouvoir ! Ici la raison confondue se tait.

Sans doute Dieu est saint & trois fois saint.

  1. Voyez le Commentaire sur la Bible, tiré de divers Auteurs Anglois, Tome V. première partie, pag. 127. Voici la réflexion du Commentateur à ce sujet, d'après Mrs. Saurin, Le Clerc & Stakhouse. « Il est vrai, dit-il, que selon les loix divines & humaines, les enfans ne doivent être mis à mort pour leurs peres. Mais cette regle ne regarde que les hommes, elle n'est point applicable aux jugemens de Dieu. » On en donne les raisons qui se réduisent à celle que je trouve dans le même commentaire, au même Tome, seconde partie, page 190. « La loi expresse qui défend de punir les enfans pour les crimes de leurs peres, ne regardoit que les Tribunaux humains & n'étoit destinée qu'à en regler les sentences, mais elle ne peut avoir lieu par rapport à ce grand Être qui sait faire passer de la mort à la vie, & mettre ainsi ceux, dont il abrége les jours, dans la possession d'une gloire inaltérable & éternelle. »
    Il ne faut se servir de ces sortes d'argumens qu'avec une grande économie, & seulement après avoir éffacé tous les autres. Quelque légitime qu'en soit ici l'application, elle pourroit être ailleurs très-dangereuse. Les Prêtres payens n'avoient point d'autre raisonnement pour excuser & autoriser les crimes de leurs Dieux. Ces Êtres ont un droit & des priviléges particuliers, disoient-ils Sunt Superis sua jura.