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On nous a encore appris que Dieu aime, qu’il hait, qu’il punit, qu’il récompense. Mais assurément, ou ces façons de parler sont vuides de sens dans notre bouche, ou elles expriment mal les attributs de la Divinité. Si l’on entend par bonté, sagesse, justice & intelligence divines, des qualités semblables, à l’extension près, à celles qui se rencontrent dans les hommes, on tombe dans un Antropomorphisme subtil qui n’en est que plus dangereux. Des traits si peu rélevés défigurent la Majesté Suprême, aulieu de la peindre.

La sagesse, qui pour nous est un choix judicieux entre le bien & le mal, un éloignement sincere de celui-ci & la pratique volontaire de l’autre ; la sagesse peut-elle convenir à celui qui par son essence est incapable de mal ? L’intelligence qui instruit, qui éclaire, qui découvre la vérité & dissipe les prestiges de l’erreur, appartient-elle à un Esprit qui n’a rien à comprendre, qui voit tout dans lui, qui sait tout, parce qu’il a tout fait ? Ou soutiendra-t-on qu’une sombre lueur qui nous égare, soit un rayon échappé de la lumiere universelle & inaccessible ? Quelle est cette justice inconcevable qui défend expressément de punir les enfans des fautes de leurs peres[1], & ordonne au Roi d’Israël d’exécuter

  1. Deuteronome Chap. XXIV. Vers 16. 2 Rois Chap. XIV. Vers 6.