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Loi 4.

L’esprit ne se connoît lui-même & ne se sent exister, que par le ministere du corps auquel il est uni.

Si l’esprit se sentoit lui-même, il se sentiroit tel qu’il est, & dès-lors il ne pourroit avoir aucun doute sur sa nature ; il se sentiroit étendu ou inétendu, corporel ou incorporel, matiere ou substance immatérielle.

L’esprit ne se sent point exister en lui-même, mais seulement par les propriétés qu’il découvre dans lui, & qu’il n’y découvre qu’au moyen des impressions qu’il reçoit du corps. Notre ame n’a le sentiment de son activité que par les désirs & les aversions qu’y excitent les objets extérieurs. Si elle n’avoit jamais senti ni plaisir ni douleur, sauroit-elle qu’elle est capable de bonheur & de malheur ? L’enfant qui n’a jamais exercé la faculté de remuer son bras, ne soupçonne pas que cette puissance réside dans lui, etc.

En un mot l’ame n’est pas plus instruite sur sa propre essence que sur les autres essences. Elle ne se pénetre pas plus elle-même, que la masse de son propre corps dont elle ne sent ni ne voit les ressorts intérieurs. Elle ne parvient à se connoître que par l’épreuve qu’elle fait de ses facultés ; & comme