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bien sujette à se démentir, si elle ne posoit que sur la vaine spéculation du tort ou de l’avantage qui peut résulter de telles ou de telles actions, pour la société commune. Mais elle est tout autrement forte & sûre, dès qu’elle est déterminée par un sentiment vif & voluptueux du bien, & par une impression également vive & pénible du mal. J’ai une joye secrette à songer que des impulsions organiques, indépendantes de ma raison, reglent le jugement que je porte des qualités humaines. Je suis sûr de tout ce qui part en moi de l’instinct qui ne peut me tromper : mais je compte peu sur de vains raisonnemens qui peuvent me faire illusion, & que j’ai souvent surpris en mensonge. L’amabilité de la vertu n’est que le plaisir naturel, que nous y prenons, & la laideur du vice n’est que le déplaisir qu’il nous cause naturellement aussi. Ce sont donc les impressions différentes que font les actions & qualités humaines sur le sens moral, qui fixent leur moralité. Le plaisir immédiat qu’elles y excitent, leur donne le caractere de la vertu : le déplaisir immédiat dont elles l’affectent, leur imprime la tache du vice. C’est à peu près ce que j’ai déjà dit dans le chapitre précédent en d’autres termes.

CHAPITRE IX