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Il existe dans l’homme un instinct qui a seul toutes les qualités nécessaires d’une regle de moralité.

L’auteur de notre être nous a donné une disposition intrinseque à approuver certaines actions & certaines qualités, & à en blâmer d’autres. C’est cette disposition qu’on appelle instinct ; sentiment intérieur qu’on ne peut mieux comparer qu’au goût du doux & de l’amer. Que le créateur ait reglé les loix de cet instinct sur les rapports essentiels & immuables des êtres entre eux, cela est plus que vraisemblable. Il n’est pas moins évident que ce goût ne vient point en nous de la découverte de ces rapports métaphysiques ; qu’il les précéde ordinairement, & que si quelques esprits préoccupés jugent légérement qu’il en est le résultat, ils seront infailliblement détrompés, en considérant que le sentiment de la beauté morale ne peut appartenir à la faculté purement intellectuelle. Nous sentons le juste & l’injuste par une impulsion naturelle, comme nous jugeons des saveurs avant toute réflexion. Les enfans & les ignorans savent bien quand ils font mal. On dit que la raison le leur apprend.