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lors aussi méchante qu’il se puisse : si méchante que sa méchanceté ne sera pas susceptible de plus ni de moins. Quel surcroît de malice pourroit lui venir ? Y a-t-il de méchanceté plus grande que celle d’une créature qui veut le mal par la nécessité de son être ? Comment pourroit-elle devenir moindre ? Elle ne peut rien perdre de son essence ; & par la supposition il est de son essence de vouloir le mal par une nécessité absolue. Donc la méchanceté d’une telle volonté ne seroit susceptible ni de plus ni de moins : donc elle seroit infinie. Dans la circonstance contraire, où la volonté seroit tellement inclinée au bien qu’elle n’auroit plus la faculté de vouloir le mal, sa droiture, quoique créée, seroit infinie : ce qui est impossible.

Que gagneroit-on à se persuader que Dieu pût contraindre la volonté humaine ? Ce seroit dans lui une puissance inutile ; car réduite en acte elle contrediroit ses autres attributs. S’il s’en servoit pour forcer l’homme au mal, il cesseroit d’être infiniment saint. Si pour forcer l’homme au bien, il lui envieroit le mérite des bonnes actions, faites librement.

Tout ceci prouve que l’homme ne pourroit être incliné au bien d’une maniere irrésistible, sans que l’essence de sa volonté