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invariable de justice sans contraindre sa volonté à vouloir le bien ? Quelques-uns ont dit, oui : entrainés par un amour aveugle pour les opinions in-intelligibles. J’aurois tort d’entrer en discussion avec eux. Des esprits qui par un excès de raisonnement, sont venus à bout de se faire des mysteres pour les croire sans raisonner, sont en garde contre la lumiere de la vérité.

La volonté ne pourroit être fixée invariablement dans l’amour du bien qu’en perdant la faculté de vouloir le mal. Si elle la conserve saine & entiere, elle aura une égale activité pour les deux contraires : elle pourra adhérer indifféremment à l’un ou à l’autre, & ne sera infailliblement inclinée à aucun parti. Tantôt elle voudra le bien : dans une occasion toute semblable elle voudra le mal, sans qu’on en puisse donner d’autre raison que la puissance déterminante qu’elle a, pour s’incliner elle-même de l’un ou de l’autre côté. Ne se pourroit-il pas qu’elle fût toujours placée dans des circonstances si favorables à sa droiture naturelle, qu’elle fût invinciblement inclinée au bien ? Quelles sont les circonstances où sa droiture finie par essence & incomplette dans tous ses degrés, ne soit, essentiellement aussi, sujette au désordre, & ne laisse à la volonté le droit de rompre l’équilibre en faveur du vice ou de la vertu ?