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une facilité prodigieuse à parler longtems sur des riens, un penchant naturel pour les redites : comme si elle avoit craint qu’elles ne chargeassent nos têtes foibles d’une trop grande multiplicité d’idées.

Vous concluez donc, dirent quelques personnes de l’assemblée, que le babil des femmes apprend à parler & à penser à toute l’espece. Sans-doute, repris-je, & je soutiens de plus pour l’honneur du beau sexe, que la société retire d’un autre côté un agrément infini de ce défaut prétendu. Presque toutes les femmes ont de la voix : une voix claire, douce, flexible, propre à la musique : une voix qui nous charme, qui fait les délices des sociétés particulieres & l’amusement de la nation entiere au concert & à l’opera.

Voulez-vous me persuader, dit l’anglois en raillant, que si les femmes parloient moins, elles ne chanteroient pas si bien ?

Cela est évident, répliquai-je ; je vous en fais juge. Je conçois la voix avec un physicien moderne, comme un instrument à cordes. L’air échappé des poumons qui le soufflent, pince les fibres tendineuses de la glotte, & en tire des sons en les faisant frémir. De la flexibilité de ces fibres ou cordes vocales, de leur agilité, de la précision de leurs vibrations dépendent tous les agrémens du