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Voyez la différence de deux enfans dont l’un aura été élevé par une fille jeune, vive & sur-tout d’une langue infatiguable, & l’autre par un pédant taciturne qui n’a jamais ri. Le premier pétille d’esprit & de gentillesse : son petit jargon est plein de saillies : il parle de tout ce qui concerne son âge, & a une facilité singuliere à apprendre. Le second est presque stupide : il a un air embarrassé devant le monde, & ne sait pas dire un mot.

La nature qui a destiné les femmes à nourrir leurs propres enfans, à les élever, à former leur esprit au moins dans le plus bas âge, par la même raison qu’elle a rempli leurs mamelles de lait, a du leur donner cette volubilité de langue si propre à aider notre imbécillité, à promener notre imagination naissante d’objets en objets, à nous faciliter l’exercice de la faculté de penser, à nous familiariser de bonne-heure avec tout ce qui nous environne. Oui, mesdames, si vous parliez moins, nous penserions peu, nous penserions difficilement, nous penserions plus tard. En vérité la vie est assez courte pour que dès le commencement de notre carriere on ne néglige rien de ce qui doit contribuer au progrès de nos connoissances.

Nés au sein de la société, où le langage naturel des gestes est presqu’inconnu, il est