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les querelles, divise les familles, & est si souvent le fléau des maris. Par quels avantages ce vice peut-il dédommager la société des maux qu’il y produit ? Vous serez bien habile, monsieur, si avec toute la sagacité que je vous connois, vous pouvez y découvrir seulement un dégré de bien contre cent degrés de mal. Au reste il n’est pas question ici de l’usage de la parole qui, s’il est raisonnable & modéré, est sans-doute aussi utile chez les femmes que chez les hommes ; mais de cet étrange abus que nous en faisons, tel que je viens de le peindre. Prouvez que cette loquacité est aussi utile au genre humain qu’elle lui est visiblement dommageable. Voilà votre tâche.

Je ne sais si l’intention de ma belle parleuse étoit de mortifier quelques personnes du cercle ; je vis au moins quelques visages s’obscurcir : ce qui me fit espérer qu’on m’écouteroit volontiers. Je lus dans tous les yeux qu’on étoit très-disposé à entendre l’apologie d’un vice qu’on chérissoit assez pour souhaiter qu’il fût raisonnable. Cela m’encouragea à parler ainsi.

Mesdames, jamais je n’ai entrepris de cause avec plus de plaisir, tant par rapport au sexe aimable qu’elle intéresse, que pour la foule de bonnes raisons qui se présentent à mon esprit en sa faveur. Il est incontestable