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par un enchaînement de propositions délicates, ont admis des maximes très-suspectes en morale, quoique leur conduite fût à tous égards irréprochable : ensorte qu’on pourroit dire de ceux-ci : faites ce qu’ils font & non ce qu’ils enseignent.

Pour rendre raison de cette double inconséquence, d’une maniere moins vague qu’on ne l’a fait jusqu’ici, je dis que, comme il y a dans l’homme une certaine quantité de bonté avec une dose proportionnée de méchanceté, des prédicateurs exhalant presque toute leur vertu en paroles, il ne doit pas leur en rester beaucoup pour l’action ; au-lieu que la grande dépense que Hobbes, Bayle & Spinosa, en ont faite dans leur conduite, a occasionné la disette qui s’en trouve dans leurs écrits. Tel est l’empire secret de l’équilibre naturel des biens & des maux sur certains caracteres, qu’ils sont forcés de contrebalancer par de bonnes mœurs le mal qu’ils disent ou qu’ils écrivent, ou d’avoir des vices qui empêchent le trop grand bien qui résulteroit d’une vie analogue à la morale sainte qu’ils débitent. Ici la religion est un culte pur & saint : là une idolâtrie : plus loin une débauche horrible. Les horreurs de la superstition, ni les