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comme dégagé des égards qu’il doit aux autres êtres, au-dessus de tout ce qui n’est pas lui, qui par conséquent ne peut tirer que de lui-même les motifs de ses actions ; si, dis-je, un tel être est aussi ardent pour le crime que pour la justice, vous conviendrez sans hésiter qu’il y a dans son essence autant de degrés de malice que de bonté ; puisqu’on peut dire que c’est son essence pure qui agit dans lui. Cette indépendance fut réalisée, à peu de chose près, dans les empereurs romains. Eh bien ! Rome a-t-elle compté sur le trône des Césars plus de Tite que de Tibère, de Trajan que de Néron ! Mettez les vertus de Marc-Aurèle auprès des vices d’un Héliogabale, la gloire que l’espece tire des premieres, à côté de l’opprobre éternel dont les autres l’ont couverte, & jugez ensuite de l’excellence réelle de l’humanité.

Maîtres absolus de leurs actions, les bons princes ont confondu leur bonheur avec celui du peuple. Ils répandoient à pleines mains les bienfaits. Leur présence, comme celle du soleil, portoit par-tout la vie & la joye. Les hommes soumis à leur puissance n’étoient pas les seuls à recueillir les fruits de leur générosité. Elle n’avoit point d’autres bornes que celles de l’univers. Du trône où elle étoit assise avec l’équité, elle