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à ses côtés la vanité & la honte, & puis toutes les autres confusément à leur suite.

Nos premiers parens étoient nus : ils ne rougissoient point de leur nudité, & ils n’avoient garde de tirer vanité de leur parure. Aussi avoit-elle d’autres objets. Dès qu’il y eut un être capable de se comparer aux autres, l’amour-propre parla : mais le sentiment chagrin de la honte tempéra le plaisir de la vanité. Le premier homme, seul encore & sans compagne, poussé par la vivacité de ses besoins naturels, après avoir rassasié sa faim & étanché sa soif avec les brutes, dut encore chercher autour de lui une créature à laquelle il eut rapport par son sexe, & n’en trouvant point, il dut avoir honte de se sentir inférieur aux autres animaux, par l’impossibilité de satisfaire un appétit qui sembloit lui promettre tant de délices. Mais si à son reveil il vit à ses côtés cette femelle aimable qu’il avoit cherchée, la vue des graces repandues libéralement sur toute sa personne, où ses yeux erroient si avidement & se fixoient avec un sentiment si doux, la lui fit regarder comme plus parfaite que la femelle des autres êtres vivans : quand la jouissance l’eut rendu heureux, il dut s’estimer au-dessus de tout ce qui existoit, puisqu’il étoit seul digne de posseder une créature que le plaisir lui peignoit sous les traits les plus excellens. La vanité