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insupportable presse l’animal de réparer ses forces qui se perdent. Le plaisir commence ; & l’existence presqu’éteinte non-seulement se continue, mais se ressuscite par des sensations flatteuses, ou plutôt avec le plaisir, & par la cause du plaisir. Qu’on suive de près ce manege de la Nature, on verra que toujours l’excès de la douleur amene l’extrême du plaisir ; qu’il s’affoiblit ensuite à mesure qu’elle s’efface ; qu’à la derniere dégradation du plaisir, la douleur recommence, bien foible à la vérité, & peu sensible ; mais qu’elle croît incessamment jusqu’à ce qu’étant remontée à un certain point, elle force l’animal de recourir de nouveau au remede accoutumé.

La continuité de l’existence animale est donc tissue de sensations désagréables, qui l’alterent & de sensations agréables qui la réparent. C’est un flux & reflux continuel de bien-être & de mal-aise. L’Etre sentant continue d’exister par les causes qui soutiennent son organisation. Mais pourquoi ce soutien lui est-il donné ? Parce que la machine se dérange, & s’use sans cesse. Quand lui est-il donné ? Lorsque le besoin est très-urgent. En quelle mesure l’a-t-il ? Autant que l’exige son mauvais état. Rien de plus.

J’ai fait voir, dans un chapitre précedent, que les individus n’ont pas l’existence pour eux. Leur satisfaction particuliere n’est pas,