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des formes qu’elle a données à la matiere ; cette infinité de formes contient deux autres infinités, celle des formes régulieres & celle des formes irrégulieres. La variété de la nature est dans les propriétés infinies des corps, dont il n’y en a aucune ni absolument bonne ni entiérement mauvaise. Elle est encore dans la diversité des esprits & des caracteres : ici sur-tout le bon est balancé par le mauvais, non seulement la science par l’ignorance, la vérité par l’erreur, la vertu par le vice ; mais aussi les avantages de la science, de la vérité & de la vertu par les inconvéniens qui les suivent, & les inconvéniens de l’ignorance, de l’erreur & du vice par les avantages réels que le tout en retire. C’est que par la liaison nécessaire du bien & du mal dans un plan quelconque créé & fini, chaque variation de l’un engendre une variation proportionnée de l’autre ; si le spectacle de l’univers est aussi diversifié qu’il se peut en bien, il a de même toutes les nuances du mal. L’harmonie de la nature éclate dans les mouvemens des corps célestes : car les cieux racontent la gloire de Dieu, & le firmament annonce l’ouvrage de ses mains ; & l’accord magnifique de ces révolutions, en répandant sur notre terre les ténebres & la clarté, la divise en climats glacés, climats brûlans, climats