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2 LA LOGIQUE DE L’ASSERTION PURE

que lorsque, par l’effet des contradicteurs ou des opposants, le souci de vérification surgit, que l’on en vient à « déliter » ces blocs, à les analyser pièce par pièce et à les reconstruire proposition par proposition. Ce qui finalement résiste à l’effort critique, constitue un système de relations ou de propositions s’appuyant soit à des faits précis, soit à des notions bien définies sur lesquels le raisonnement logique a vraiment prise.

Ce n’est qu’au prix d’une véritable ascèse intellectuelle que la science, cette œuvre collective des générations, prend solidement corps et donne progressivement à ses créations la forme précise, claire et rigoureuse que requiert la pensée logique. Et même dans ces domaines privilégiés, subsistent bien des difficultés et de multiples défaillances, témoin aujourd’hui non seulement les difficultés auxquelles se heurte une véritable théorie du raisonnement mathématique, mais encore toutes les confusions et les obscurités des logistiques modernes.

Il convient donc de distinguer avec soin entre l’effort logique immanent à l’activité intellectuelle soucieuse de vérification, et la logique comme discipline spéciale issue de la réflexion sur ce labeur. L’idée même d’une pensée rigoureusement logique est davantage un idéal et une vection qu’une réalité intellectuelle acquise.

2° Au point de vue génétique, la pensée logique est soumise à une série de conditions préalables de nature psychique que les belles études de J. Piaget[1] surtout sur la genèse du raisonnement enfantin ont

  1. J. Piaget, Le Jugement et le raisonnement chez l’enfant, notamment ch. V : Résumé et conclusions.