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Les mobilisés, toutes les fois que cela leur a été possible, se sont empressés de se faire couper, arrêter et constituer prisonniers. Les Allemands n’en sachant que faire et pressés d’en être débarrassés, les promenaient par troupeaux avec une douzaine de cavaliers en tête des colonnes, laissant les flancs et la queue libres ; mais personne ne voulait s’échapper ; on avait peur d’être contraint de reprendre les armes.

En même temps, le percepteur avec toute l’administration civile a continué à être parfaitement et complètement obéi ; on lui a gardé l’argent qu’on lui devait et on a même entre plusieurs mains et dans bien des endroits, gardé sa caisse. Je conclus de ce que j’ai vu alors que lorsque la légalité, la puissance régulière de faire fonctionner l’administration sera dans les mains de la majorité parlementaire et de ses chefs, l’habitude d’obéir, non à l’État mais à ses rouages, pourra et devra même, aux yeux de bien des gens, produire de grands mirages, donner lieu à bien des illusions et qu’il pourra se faire dès lors que les chefs militaires dévoués, pour un motif ou pour un autre, au salut des intérêts sociaux menacés, trouvent en face d’eux tels autres généraux qui leur diront :

— Je reste dans la légalité ; je suis l’homme du devoir ; je ne cours pas les aventures ; le ministre de la guerre que je ne connais pas plus que vous, mais qui est le ministre de la guerre nommé légalement par le gouvernement de la majorité, me donne des ordres, je les suis, et je me lave les mains du reste.

Il n’y a absolument rien à répondre à cette logique, seulement voilà la guerre civile et il ne s’agit plus uniquement d’une sédition à réprimer : voilà que toutes les