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de peines, de fatigues, de doutes ! Et, cependant, la démocratie se montra tellement impuissante sur son champ de triomphe ainsi préparé, elle défendit si mal ses positions, que les forts, l’enceinte, l’innombrable artillerie, les bataillons multiples, rien ne put lui servir, rien ne put la sauver et elle se laissa étouffer dans le sang.

CHAPITRE XXXII.

Elle avait pourtant quelques chefs vraiment militaires et elle aurait pu en tirer meilleur parti. Des étrangers, qui, plus ou moins, avaient fait la guerre, ou saisi des bribes de ces connaissances qu’elle exige ; des déserteurs ; mais ces hommes du métier avaient, ne fût-ce que par habitude, un certain besoin d’ordre, une certaine suite dans les idées ; le monde démocratique ne se plie volontiers à rien de semblable. On leur préférait le général Duval, le général Eudes, le général Bergeret ; ceux-là n’étaient point des généraux et on les suivait à son aise. Sous leur commandement, on vivait dans le caprice et on espérait les inspirations de génie. C’est la disposition la plus naturelle aux foules exaltées ; autrefois elle n’était pas constamment folle, puisqu’elle a rencontré ça et là ces grands libérateurs, Gédéon, les Macchabées, Jeanne d’Arc. Elle ne réussit plus de nos jours. Les temps ont changé. M. Gambetta ne s’en était pas aperçu plus que les hommes de la Commune lorsqu’il avait prétendu peu de mois auparavant être Gédéon et diriger les opérations de la campagne et du champ de bataille. On peut compter qu’il n’est pas guéri de cette prétention. Mais, pour le moment, revenons à la Commune ; elle ne sut pas se servir et ne voulut pas des hommes spéciaux qui auraient