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disent « fiat », et la chose, non pas se fait (ce n’est pas encore venu) mais doit se faire et vient peu à peu.

Nous changerons tout, continuent ces philanthropes ; c’est exact et nous en convenons franchement ; d’ailleurs, si par un phénomène ordinaire dans les hautes régions où le tour de roue politique nous a transportés, nous venions jamais à envisager nos projets sous un jour nouveau qui nous pût porter à changer de visées, nous savons bien, que nous deviendrions à l’instant pour ceux qui nous poussent, nous dressent, nous portent, nous haussent, des traîtres ; nous n’ignorons pas que dans le métier que nous faisons, les soldats n’ont d’autre moyen d’assaut que de sauter sur les épaules du chef qui semble faiblir et nous ne voudrions pas qu’on nous sautât sur les épaules comme Danton l’a fait à Vergniaud, Robespierre à Danton, Tallien à Robespierre. Nous serons donc les hommes que l’on suppose au moins aussi longtemps que nous pourrons et donc, nous allons tout doucement, mais, soyons-en persuadés, tout doucement, porter la main sur tout, casser, c’est vrai, mais sans faire de bruit. Nous casserons ce qui reste de liberté individuelle ; nous casserons les conditions actuelles de la propriété ; non pas que nous en voulions à cette base indispensable de toute société humaine ; on nous fait tort quand on nous en accuse et on se trompe ; nous voulons seulement rendre possible et opérer un glissement qui la fasse passer dans d’autres mains inutiles à désigner ; quant à la religion, nous la casserons à coup sûr ; mais ne croyez pas que ce soit en tant que catholicisme ; nos idées sont plus larges que vous ne le supposez et nous n’en voulons pas plus au pape qu’au Mufti et au grand lama. Ce qu’il nous faut c’est que l’homme moderne appartienne tout