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seigneurs de l’ancien régime se donnaient la peine de naître seulement, c’est vrai ; mais les choses étaient arrangées de telle sorte qu’on déposait ces glorieux nourrissons tout-de-suite dans un berceau où ils trouvaient illustration, crédit, puissance héréditaire, fortune immense, beaucoup d’éclat et quelquefois ils y ajoutaient d’eux-mêmes, ce qui n’était pas défendu, une certaine somme de mérite personnel.

Le député, en venant au monde, ne trouve absolument rien du tout. Il sort de l’urne qui est sa mère, engendré par un coup de hasard, le plus ordinairement. Il n’oserait pas toujours se risquer dans une seconde conception et généralement rien n’est moins immaculé. Il peut, il est vrai, comme le grand seigneur, n’avoir pas négligé de se munir de quelque valeur personnelle, mais ce n’est nullement un besoin. Le Saint-Esprit n’en est pas moins là qui plane imperturbablement sur son cerveau et il lui est loisible, il lui est commandé d’aspirer à toutes les fonctions, d’attendre tous les honneurs. Il y a droit. Seulement de même que dans son département, il lui a fallu une majorité pour venir au monde, oh ! mon Dieu ! quelques voix seulement suffisent ! de même pour être un député papable, il faut encore qu’il appartienne à une autre majorité, celle qui, pour le moment, a la haute main dans sa Chambre, mais ce point acquis, il regardera avec un dédain profond le grand seigneur auquel il a succédé, car celui-ci n’aurait jamais, certainement, où rêver le vol que le député va prendre.


CHAPITRE XXIII.

On a remarqué, que depuis 1789, la valeur intrinsèque des assemblées politiques avait été constamment