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maine de l’antique cité. Quand la nouvelle fut bien et complètement bondée de gens sans aveu, étrangers, gens d’esprit, venant de tous les coins du monde où germe le goût des aventures et qu’en conséquence la notion républicaine fut tombée en impuissance, comme la notion monarchique s’est effacée à Paris devenu l’arène des gens sans patrie, on fit à Rome révolution sur révolution jusqu’à ce que l’ennui du désordre eût engendré le goût du despotisme absolument comme à Paris.

Mais, il demeura toujours des républicains et ceux-ci se firent compter et estimer des Césars, des affranchis, des coquins de toutes les espèces, pour être les derniers représentants de l’espèce rare qu’on appelait, en ce temps-là, les gens honnêtes. Cette marque distinctive de l’opinion conduisit, dans le premier temps, Thraséas et d’autres au tranchant du couteau, mais on n’en persista pas moins à croire universellement, non pas qu’il fallût rétablir un ordre de choses dont les premiers et plus simples éléments n’étaient plus à trouver, mais que ceux qui le regrettaient étaient en définitive l’élite de la société et de cette persuasion, il arriva que les princes se piquant de vertu ou même simplement d’habileté, firent sonner très haut leur goût pour les doctrines républicaines, et en mirent l’esprit en pratique le plus souvent et le plus complètement qu’il leur fût possible. L’histoire continue à savoir beaucoup de gré à Trajan et à Marc Aurèle d’avoir été républicains sous le diadème, c’est-à-dire d’avoir continué, repris, restauré autant qu’il était en eux, les doctrines, les maximes, les habitudes, les façons de procéder, d’administrer, de croire qui avaient constitué Rome et présidé à ses grandeurs.

C’était beaucoup déjà, de produire pendant des siècles