Page:De Gobineau - La Troisième République française et ce qu'elle vaut, 1907.djvu/46

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 32 —

n’en faut pas faire. Soit, mais on en a fait ; elles ont porté, même, plusieurs moissons de fruits. Il n’en faut plus faire du tout, et en cela nous sommes de votre avis. Or, nous sommes les gens de 1830 et vous voulez nous jeter par terre ? Vous êtes des inconséquents. Il ne faut pas de révolution. Nous sommes les gens de l’Empire ? Vous devez nous conserver par la haine judicieuse du changement. Nous sommes la République ? Il vous est défendu de nous toucher, car si le mérite suprême de la Légitimité est d’empêcher les révolutions, n’en faites pas.

Supposez les royalistes demeurés de purs royalistes, on n’aurait jamais eu à leur adresser ce reproche qui, naturellement, manque à les convertir mais n’en affaiblit pas moins leur crédit sur les masses parmi lesquelles leur action a, d’ailleurs, toujours été faible et le devient constamment davantage. Ce n’est pas un fait commun dans l’histoire que d’avoir vu, comme on l’a vu, une monarchie de huit siècles, s’effondrer en dix-huit mois, sans que presque personne, sauf des dévouements isolés, ait cherché à la maintenir. L’insurrection de Lyon, du Languedoc, se firent beaucoup moins en faveur de la monarchie que suscitées par les notions provinciales ; la Vendée et la Bretagne tentèrent les grandes choses qu’on leur vit accomplir, pour la religion ; le royalisme pur eut l’émigration et un certain nombre de fidèles mêlés à des soldats qui voulaient bien s’associer à lui, combattre avec lui, mourir avec lui, mais qui n’avaient pas pris les armes pour lui. C’était la conséquence des errements suivis par la royauté elle-même. En concentrant de longs, perpétuels, incessants efforts pour attirer à Paris toutes les forces et ressources de l’État, dans ses