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le régime actuel tourne à ne pas savoir tourner, à ne trouver ni même à croire qu’il existe une issue par laquelle il puisse s’en aller sans trop de bruit et heureusement. Et voilà un peuple à qui l’on dit et répète que le bon sens est sa qualité distinctive ! Et depuis soixante ans, il s’est procuré, par ses mauvais déportements, tant de révolutions et trois invasions étrangères et il n’est pas au bout et on le voit rire et répéter avec complaisance : mon bon sens !

L’esprit reste confondu à considérer qu’il peut être au pouvoir d’une collection humaine de se laisser tromper, aveugler, bafouer, piper, truffer, jouer, abuser et vilipender de telle sorte ? qu’elle ne voit plus qu’on ne fait jamais et ne saurait faire un plat quelconque sans l’élément nécessaire ; qu’une république ne saurait se produire au soleil, sans être combinée, composée, pétrie, cuite avec des ingrédients et par-dessus tout, un esprit républicain. Tout ce qu’on peut mettre au monde, quand on sort des conditions normales, judicieuses, oui, des conditions sensées de l’existence politique ce n’est certainement pas la monarchie, mais ce n’est certainement pas non plus la République, ce n’est pas même encore le pressurement militaire, fait lamentable, mais du moins logique, dans ses fréquentes et turbulentes métamorphoses ; ce qu’on peut mettre au monde, c’est uniquement la conclusion inévitable de la sénilité et du désordre, quelque chose de faux et de bâtard, sous lequel on se met à l’abri pour quelques heures, non pas monument, non pas maison, non pas même chaumière, c’est un appentis, le régime de la Convention, le Gouvernement Provisoire, celui de la défense nationale, le Septennat, toujours la même chose, avec l’infériorité des esprits et