Page:De Gobineau - La Troisième République française et ce qu'elle vaut, 1907.djvu/37

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 23 —

au niveau voulu ; ils voudront passer la majeure partie de leur temps sinon la totalité livrés à des travaux tout personnels ; ils vivront tournés vers eux-mêmes et remuant des idées que ni l’inspecteur ni le délégué ne pourront tenir dans la main ; enfin, ils aboutiront à un perpétuel esprit d’examen, de mécontentement et de révolte contre la fraternité. Il faut donc supprimer la science.

Il en faut pourtant garder quelque peu ; mais quelque peu qui soit directement applicable, visiblement utile, incontestablement avantageux, car on veut des chemins de fer, des télégraphes, de l’industrie et même du luxe. Comment fixer la mesure ou établir la limite de ce qui sera mis à part, de ce qui sera foulé aux pieds ?

Rien n’est nouveau sous le soleil, et la tentative a déjà été faite, même elle a réussi, et, par cette route, voilà les socialistes se rencontrant face à face, dans le même carrefour, avec les adeptes du monde administratif. Ceux-ci par la pratique de l’égalité, de l’ancienneté, de la faveur, sont arrivés à n’être que des mandarins fort incapables, très dévots à des notions fort courtes ; ceux-là, par la pratique de la fraternité, du nivellement, de la science tronquée et partant morte, sont absolument semblables à eux, et les uns comme les autres, sans l’avoir prévu et sans l’avoir voulu, ayant également gravité vers le pôle de l’organisation, se trouvent également bien proportionnés pour atteindre au plus bas niveau que puisse souhaiter le despotisme. Voilà comme quoi ce qui se dit républicain en France, soit par une voie, soit par une autre, tourne le dos résolument à l’établissement sérieux de la République et marche imperturbablement vers la tyrannie.