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qu’à l’étranger on s’y soit généralement trompé ; c’était une dynastie et, d’une certaine façon, une légitimité ! On aspirait à quelque chose de défini et de stable. Qui se rappelait, dans le pays le plus oublieux qui fût jamais, les origines et l’histoire de la France ? Qui se rappelait le Roi de Bouvines et Saint-Louis et ses gloires et Henri IV et même Louis XIV ? Les royalistes tout au plus, mais pour Napoléon Ier, il en allait autrement.

Dans leur désir de rendre la durée de la Restauration impossible, les libéraux s’étaient, depuis 1817, ingéniés de toutes les manières pour opposer la monarchie militaire tombée à la monarchie traditionnelle de retour, et, avec un tact parfait, ils avaient immédiatement créé une tradition pour la monarchie militaire. Grosses histoires, petits livres, tableaux, statues, images à deux sous, toujours dans la bonne et ferme intention de ruiner la maison de Bourbon, les amateurs du parlementarisme n’ont rien épargné pour encadrer le nom du conquérant dans le plus durable et magique prestige. Ils ont fait revenir de loin les cendres du héros et, ne sachant qu’inventer on peut dire qu’ils ont divinisé l’idole. Car à le bien prendre et à considérer même sans grande attention l’abside de l’Église de la Magdelaine, Napoléon y prime au moins la patronne du temple et peut-être Dieu le Père.

Il n’y a donc rien d’étonnant à ce qu’en 1848, toute la partie des populations qui n’était pas pleinement convaincue que c’était le premier Empereur lui-même qui allait reparaître, et bien des gens le tenaient pour certain, toutes ces populations voulussent au moins avoir un souverain de ce sang et rompre pour toujours avec la Révolution, en se replaçant sous le sceptre qui leur re-