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Ces générations commençaient à naître qui sont bien convaincues que mal passé n’est que songe. On ne voyait peut-être pas encore des gens ne croyant pas à ce qui s’était passé sous la Convention ; mais il s’en trouvait déjà qui considéraient ce qu’on en pouvait dire comme fort exagéré. Sous la Restauration on se perfectionna ; les conspirations avortées furent déclarées n’avoir jamais existé que dans les manœuvres de la police ; les Bonapartistes se trouvèrent soudain les meilleurs amis des libéraux ; les uns comme les autres professaient les mêmes principes, grâce à l’échange d’idées le plus fraternel : toi, Bonapartiste, tu vas découvrir que tu aimes la liberté et moi, libéral, je serai pris de la plus noble passion pour la guerre et ses lauriers et tous les deux nous serons les amants jaloux et exclusifs de la Charte !

Sous Louis-Philippe, après les histoires de Saint Merry, de la rue Tournonaise et tant d’autres affaires du même genre, les gens d’esprit professèrent combien il était ridicule de croire aux révolutions et d’effrayer les enfants de tels croquemitaines, ce qui mena doucement à la révolution de février et aux massacres de juin.

On en était à peine sorti que le bourgeois de Paris recommença sur les instigations des personnes bien informées à se moquer de plus belle et du fond de son cœur du spectre rouge, jusqu’au moment où vint la Commune et, maintenant, de quoi, en bonne conscience, pourriez-vous avoir peur, quand on vous dit qu’on se sent si fort désormais qu’étant bien maître de la légalité et de lui donner la portée que l’on voudra, il y aurait véritablement abus et niaiserie à vous accabler encore d’algarades ?

Je ne sais ce qu’on va faire, mais ce qui est assuré