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de tous ceux qui ont connu cet homme vertueux et si estimable.

Sir Étienne Taché est trop avantageusement connu pour que ma faible voix puisse le rehausser dans l’estime de ses concitoyens ; n’appartient-il pas à l’histoire de cette colonie dont il a été un des plus ardents défenseurs pendant la guerre de 1812, et aussi par les luttes parlementaires qu’il a soutenues depuis en défendant les droits les plus chers de ses compatriotes ?

Sir Étienne Taché est ce que les Anglais appellent : a self made man, que je traduirais : un homme qui s’est fait lui-même ce qu’il est. Les deux souches de la famille que j’ai citée n’étaient pas également favorisées de la fortune : le seigneur de Kamouraska était riche et n’avait qu’un seul enfant, tandis que son frère, peu fortuné, était en outre chargé d’une nombreuse famille et partant empêché de lui donner une éducation aussi libérale qu’il l’aurait désiré, mais Sir Étienne a tout ployé sous sa volonté de fer, et brisé tous les obstacles. Il est devenu un habile médecin par sa persévérance et son énergie ; il a fait plus : ses amis, connaissant la violence naturelle de son caractère redoutaient pour lui les luttes de la tribune, mais par un effet de sa volonté d’airain, il a réussi à dompter sa nature inflammable, comme le salpêtre, et il s’est constamment montré calme, froid et déférent dans ses rapports politiques avec ses concitoyens et dans les débats parlementaires. Se vaincre soi-même me paraît le plus grand, le plus noble et le plus difficile des triomphes.