Elle couchait seule dans la partie nord-est de la maison, séparée de son fermier qui occupait le côté opposé, par un appentis attenant aux deux édifices : ses deux domestiques restaient avec la famille du dit fermier où était aussi la cuisine.
Elle entre un jour sur la brune dans sa cuisine après avoir fait sa ronde ordinaire aux alentours, et y trouve un homme seul le dos tourné à la cheminée dans laquelle il y avait un reste de feu. Elle lui demande ce qu’il y a pour son service. Jean-Baptiste, très-farceur, pour toute réponse se met à battre la campagne et à tirer quelques quolibets qui furent très-mal accueillis par mon héroïne, qui ne crut voir en lui qu’un émissaire de la bande redoutable cherchant à connaître les airs de la maison.
— Je n’avais pas d’armes dans les mains, disait-elle, et je craignais qu’en me baissant pour prendre le tisonnier il ne m’assommât ; mais j’avais heureusement mes galoches[1] ferrées dans les pieds, dont je lui appliquai un si vigoureux coup dans le ventre, qu’il culbuta parmi les tisons au grand dommage de ses culottes. J’allais redoubler, lorsqu’il me cria en détachant les tisons qui le chauffaient : c’est moi ! Mademoiselle Agathe ! c’est moi, Peltier, l’ami de votre fermier, qui suis venu lui demander à couvert.
Ma tante au désespoir fit mille excuses de sa promptitude au pauvre diable de Peltier, mais lui reprocha aussi de s’y être exposé dans un temps où tant de voleurs rôdaient dans la campagne. Elle répara le dom-
- ↑ Les crampons des galoches d’autrefois étaient d’un pouce de longueur.