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laquelle le suivaient plusieurs de ses amis indignés de sa conduite discourtoise.

— Nous sommes surpris, de Lanaudière, disaient Messieurs Sewell, de Salaberry et le major Doyle,[1] qu’un gentilhomme aussi bien élevé que vous l’êtes, puissiez, sous votre toit, manquer aux égards que l’on doit à la vieillesse et à une dame aussi respectable !

— Que voulez-vous ! mes chers amis, disait mon oncle : c’est plus fort que moi : la bonne femme est si ridicule qu’il m’est impossible de m’empêcher de rire.

Une conversation très animée s’engagea bien vite entre les jeunes dames et la douairière : chacune d’elles la complimentait, sur sa toilette, de l’air le plus sérieux du monde ; et la vieille de faire l’énumération de toutes les conquêtes que sa robe de velours cramoisi lui avait jadis values. Madame Smith, veuve du juge en chef de ce nom, et mère de Madame Sewell, Madame Smith déjà sur l’âge admirait franchement une toilette qu’elle comparait à un habillement semblable qu’elle avait vu à sa grand-mère ; et regrettait beaucoup de ne pouvoir parler la langue française afin de converser avec la respectable seigneuresse.

Ce ne fut qu’après avoir conversé pendant longtemps, ou avoir fait souffrir de ses ridicules, de ses excentricités, suivant leur caractère, ceux qui l’entouraient, qu’elle leur dit :

— Vous avez eu l’obligeance de me transporter aux

  1. Le major Doyle avait épousé une Demoiselle Smith, sœur de Madame Sewell. Il est mort Général, dans la péninsule, je crois.