Page:De Gaspé - Mémoires. 1866.djvu/503

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ductions. Si vous ne possédez pas, jeunes poètes, la langue de cet auteur sublime, mettez-vous de suite à l’œuvre ; la tâche sera rude, mais aussi quelle récompense vous attend ! vous serez à chaque instant étonnés de la profondeur du génie de cet homme prodigieux.

Les poètes français qui ont traduit Shakespeare ne lui ont pas, à mon avis, rendu assez de justice ; il faut, pour bien l’apprécier, en lire le texte même, ou bien une traduction en prose aussi fidèle, aussi mot à mot que possible.

Si mon précepteur me donnait des leçons de langue anglaise, moi de mon côté je l’initiais davantage à la langue française, je lui prêtais nos classiques ; et je venais à son secours au besoin.

La méthode des précepteurs anglais à cette époque était d’assommer les enfants pour leur graver plus profondément dans la tête les auteurs grecs et latins, mais, à ma connaissance, l’excellent M. Jackson n’infligeait que de rares punitions : et encore à un seul de ses pupilles qui prenait à tâche de le faire endiabler.

La mort seule a brisé les liens qui m’attachaient à Monsieur et à Madame Jackson.

Quel plaisir j’ai eu quelques années après, lorsque je tenais maison, de leur prouver qu’ils n’avaient pas comblé un ingrat de bontés. Ce respectable couple n’avait qu’un seul et unique enfant : un aimable petit garçon dont tous les écoliers raffolaient ; sa mort prématurée vers l’âge de vingt ans a empoisonné les dernières années de ces bons parents si doux, si sensibles, si affectueux.